Comme quoi tout était déjà écrit…

Texte de Nadar, écrit aux alentours de 1860 

“La photographie est une découverte merveilleuse, une science qui occupe les intelligences les plus élevées, un art qui aiguise les esprits les plus sagaces et dont l’application est à la portée du dernier des imbéciles. Cet art prodigieux qui de rien fait quelque chose, cette invention miraculeuse après laquelle on peut tout croire, ce problème impossible dont les savants qui le résolvent depuis quelques vingts années en sont encore à chercher le mot, cette photographie qui avec l’électricité appliquée et le chloroforme, fait de notre XIX ème siècle.

Cette surnaturelle photographie est exercée chaque jour, dans chaque maisons, par le premier venu et le dernier aussi, car elle a ouvert un rendez-vous général à tous les fruits secs de toutes les carrières. Vous voyez à chaque pas opérer photographiquement un peintre qui n’avait jamais peint, un ténor sans engagements, et de votre cocher comme de votre concierge je me charge, c’est sérieusement que je parle, de faire en une leçon deux opérateurs photographes de plus.

La theorie photographique s’apprend en une heure ; les premières notions de pratiques en une journée.


“…Ce qui ne s’apprend pas…, c’est le sentiment de la lumière, c’est l’appréciation artistiques des effets produits par les jours divers et combinés, c’est l’application de tels ou tels de ces effets selon la nature des physionomies qu’artiste vous avez à reproduire.


“Ce qui s’apprend encore beaucoup moins, c’est l’intelligence moral de votre sujet, c’est ce tact rapide qui vous met en communion avec le modèle, vous le fait juger et diriger vers ses habitudes, dans ses idées, selon son caractère, et vous permet de donner, non pas banalement et au hasard, une indifférente reproduction plastique à la portée du dernier servant de laboratoire, mais la ressemblance la plus familière et la plus favorable, la ressemblance intime…”